RÉFORME DE LA POLITIQUE LAITIÈRE AMÉRICAINE Les USA songent à un zeste de gestion de l'offre
Pour permettre à leurs producteurs de vivre avec une forte volatilité du prix du lait et des intrants, les USA songent à piloter l'offre en cas de crise.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
L'UE et les USA ont tiré leurs propres leçons de la crise de 2009. Bruxelles a accouché du paquet lait qui ne change rien à la voie tracée : démantèlement des outils publics de gestion du marché. Tout au plus, les producteurs ont obtenu, en dérogation au droit de la concurrence, la possibilité de se regrouper pour négocier avec les transformateurs. Paradoxe, Washington qui régulait a minima via des programmes nationaux d'abattage (financés sur des fonds privés), envisagent de mettre un zeste de gestion de l'offre pour soutenir autrement ses producteurs. Le fait est que leurs aides contracycliques(1), et leur mécanisme d'intervention et d'aide à l'exportation se sont avérés inefficaces pour supporter la volatilité du prix du lait et des intrants. Les 20 milliards de dollars partis en fumée en 2009, avec la perte de 20 % des fonds propres des exploitations laitières américaines, chiffre cité par la Fédération nationale des producteurs (NMPF), ont choqué les esprits.
Le Sénat approuve
Producteurs et représentants de l'industrie (IDFA) s'accordent sur un point : mieux vaudrait allouer tout l'argent public des aides actuelles à un dispositif d'assurance. C'est tout le sens du Dairy Security Act, volet laitier du Farm Bill 2013-2017. Le 26 avril, le Sénat en a approuvé les grandes lignes. Quelles sont-elles ? Les producteurs auraient accès à un dispositif volontaire de garantie de marge sur coût alimentaire. Ce dernier serait évalué d'après une ration théorique, calculée régulièrement sur la base des prix officiels du, du maïs-grain, du tourteau de soja… Engagé dans ce DPMPP(2), le producteur serait assuré pour 80 % de sa « référence » (meilleure des trois années de son engagement) de toucher une marge de 8,80 $ sur le coût d'une ration couvrant la production de 100 kg de lait/j, nourriture des génisses de renouvellement incluse. Ce premier niveau de garantie serait gratuit, financé sur des fonds publics. Au-delà, le producteur pourrait s'assurer à ses frais pour une marge jusqu'à 17,60 $, tout en jouant sur la part de livraisons couvertes.
Forte incitation à lever le pied en cas de crise
Si le DPMPP est volontaire, il n'en est pas de même de son corollaire, le DMSP(3), programme de régulation de la production. Pour bénéficier de son assurance, le producteur s'engagerait en situation de crise (moins de 8,80 $ de marge), et seulement dans ce cas, à réduire sa production jusqu'à 4 % de sa « référence ». Le lait en trop ne serait pas payé au producteur. L'argent irait sur un fonds dédié à l'achat de produits laitiers pour des dons alimentaires. Le principe d'assurance sur marge est soutenu par les industriels, mais pas l'incitation à baisser la production. À leurs yeux, elle aura pour effet d'augmenter le prix du lait, pénalisant leur compétitivité à l'export. Autant dire qu'ils sont à la manoeuvre pour que la seconde chambre parlementaire, celle des Représentants, torpille ce zeste de gestion de l'offre.
JEAN-MICHEL VOCORET
(1) Aides compensant 45 % de l'écart entre le prix du marché et le prix objectif.(2) Dairy Producer Margin Protection Program.(3) Dairy Market Stabilization Program.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :